La critique ESI : INCEPTION de Christopher Nolan - Mission impossible dans le subconscient d’un homme
Article Cinéma du Vendredi 09 Juillet 2010

Par Pascal Pinteau

Résumer clairement l’intrigue d’INCEPTION est un défi presque aussi difficile à relever que la mission menée par Dom Cobb (Leonardo Di Caprio) et ses équipiers dans le nouveau film de Christopher Nolan. Cette immersion dans des rêves « programmés » à l’avance dans leurs moindres détails – décors, personnages, circonstances – afin d’implanter une idée dans l’esprit d’un homme dont le sort de Cobb dépend est un spectacle fascinant, qui laisse souvent bouche bée. Avec son impeccable sens de la composition de l’image, son goût du fantastique et son rejet des clichés hollywoodiens, Nolan signe un nouveau film d’auteur qui est aussi un film d’action exceptionnel, de loin le meilleur que l’on puisse voir cet été. Mais est-ce pour autant une réussite totale, comme ont pu l’être BATMAN BEGINS et LE PRESTIGE ? On peut se poser la question en constatant que l’histoire d’amour entre Di Caprio et Marion Cotillard, pivot central de l’intrigue, dont dépendent presque tous les enjeux, laisse le spectateur de marbre. Le comportement abrasif et manipulateur de Dom Cobb ne le rendant pas particulièrement attachant, à la différence d’un Bruce Wayne/ Batman dont Christian Bale a bien exprimé les tourments, on n’éprouve de la sympathie que pour les seconds rôles d’INCEPTION, notamment pour les personnages d’Ariadne (excellente Ellen Page) et Arthur (Joseph Gordon-Levitt, un talent à suivre de près ), dotés eux d’un sens de l’humour réconfortant. Privé d’un héros auquel on peut s’identifier avec plaisir, comme ce fut le cas avec le Neo de MATRIX, on reste à l’extérieur de ce film conceptuel, en admiration devant la perfection des effets visuels hallucinants d’un très bel objet un peu froid, alors qu’il devrait être propulsé par le déchaînement des passions humaines. Reste le spectacle, très souvent incroyable, qui vaut à lui seul que l’on se précipite dans les salles pour voir et revoir INCEPTION. On savait que Nolan avait été marqué par la saga James Bond dans son enfance, mais l’hommage qu’il rend ici à son film-culte, AU SERVICE SECRET DE SA MAJESTÉ (un peu oublié à cause de la présence de l’éphémère George Lazenby dans le rôle de 007), est totalement jouissif. Tout y est : les poursuites à skis, l’attaque de la forteresse enneigée trônant au sommet d’une montagne, les hommes de main qui surgissent de partout... Il ne manque plus que Blofeld caressant lentement le pelage de son chat blanc ! On imagine bien Christopher Nolan souriant de façon diabolique, comme Blofeld, en écrivant son script à tiroir et ces scènes de rêves imbriqués les uns dans les autres, avec des actions parallèles des mêmes personnages dans trois niveaux différents de simulacres. Nolan a accompli là un vrai tour de force narratif, mais même en le truffant d’explications – l’un des inévitables défauts du film – on peut craindre qu’une partie du public ne décroche et ne se perde irrémédiablement dans les méandres labyrinthiques du scénario. Le verdict des spectateurs sera passionnant à suivre. Espérons que ce film brillant, ce blockbuster à la fois cérébral et spectaculaire, connaîtra un succès à la hauteur de ses ambitions assumées.



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