WILLOW, la suite d’un film culte – Entretiens exclusifs avec Jonathan Kasdan, showrunner, et avec les acteurs de la série – 2ème partie
Article TV du Mercredi 11 Janvier 2023

Les personnages du blockbuster de Fantasy des années 80 produit par George Lucas et réalisé par Ron Howard sont de retour dans l’attachante série de Disney +

Suite de l’entretien exclusif avec Jonathan Kasdan, showrunner

Parmi les morceaux de bravoure du film original, il y a la séquence de l’attaque de l’Eborsisk, le dragon à deux têtes magnifiquement animé image par image par Phil Tippett, et aussi les tout premiers effets de morphing développés par ILM. En tant que showrunner, quelle a été votre approche de l’utilisation des effets spéciaux “concrets” et des effets visuels, en termes de design des créatures, des animatroniques réalisés par l’excellent Neal Scanlan, et des scènes de magie, comme les apparitions des minuscules personnages appelés “brownies” ?


Je suis bien d’accord avec vous, Phil Tippett est un génie et les artistes d’ILM aussi ! Nous avions envie que Phil travaille avec nous sur les effets de la série, et nous en avons discuté avec lui pendant un bon moment, mais cela n’a pas pu se faire pour des raisons de disponibilités de sa part. Cela dit, vous reverrez bien des Eborsisks et des Brownies dans la série ! C’était indispensable ! Et concernant ILM et l’approche des effets, ils disposent aujourd’hui de beaucoup plus de solutions qu’à l’époque du film original, mais préfèrent toujours partir de la réalité, d’une base de prises de vues réelles contenant des accessoires ou des éléments de référence pour amplifier ensuite ces plans avec des prolongements numériques ou des monstres 3D. Souvent, les choix reposaient sur une question de bon sens, car dans certaines scènes, il était évident qu’il fallait faire appel à Neal Scanlan et son équipe pour permettre à nos acteurs d’interagir de manière convaincante avec des créatures. Et comme vous pourrez le voir, ils se sont surpassés ! Nous avons eu recours aussi à beaucoup d’effets mécaniques, pyrotechniques, de vent, de pluie, de fumigènes, etc, car ces trucages permettent d’obtenir directement à la prise de vue les résultats dont nous avions besoin.

Concrètement, quelle est l’influence du budget sur les scripts ? Commencez-vous à écrire pour que les épisodes soient les plus intéressants possibles, sans vous imposer des limites, ou tentez-vous de créer d’emblée une équilibre entre les scènes de dialogues simples à tourner et les grandes séquences d’action avec des effets visuels sophistiqués ?

Là encore, c’est un sujet capital, surtout quand on écrit une série de Fantasy comme WILLOW. Pendant le développement des traitements des épisodes, nous avons imaginé tout ce que nous avions envie de voir, quitte à délirer un peu trop dans certaines séquences ! Puis après avoir fait un récapitulatif de tout cela avec les producteurs exécutifs, le superviseur des effets visuels, le chef décorateur, la cheffe costumière et avec Neal Scanlan, la réalité budgétaire s’est imposée à nous !

Et là, vous avez probablement dû décoller beaucoup de post-it du tableau…

Exactement ! (rires) Mais comme il fallait remplacer ces scènes par d’autres qui correspondaient aux moyens disponibles, cela nous a posé des défis vraiment passionnants à relever. Je dois dire en toute sincérité que la série n’a pas perdu au change, car ces nouvelles idées se sont avérées bien plus intéressantes que celles qu’il nous a fallu sacrifier. Les difficultés à résoudre stimulent l’imagination et au final, nous avons été ravis de coller ces nouveaux post-it ! (rires)



Entretien exclusif avec Warwick Davis (Willow Ufgood)

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Après avoir joué l’ewok Wicket dans LE RETOUR DU JEDI, caché sous votre costume de fourrure, on vous a réellement découvert en 1988, dans le rôle-titre de WILLOW. Vous est-il arrivé de penser que ce film si marquant risquait de vous cantonner à des rôles stéréotypés ?

Effectivement, comme j’incarnais un héros totalement positif dans ce film qui a été vu dans le monde entier, j’ai pensé que l’on ne me proposerait peut-être que des rôles similaires de personnages magiques et gentils. Mais au début des années 90, j’ai reçu le script d’un projet de film d’horreur intitulé LEPRECHAUN, avec la proposition de jouer un lutin vraiment diabolique. Je me souviens qu’après avoir accepté, l’auteur-réalisateur du projet m’a confié “Vous savez, Warwick, vous étiez si sympathique et positif dans WILLOW que nous avons longtemps hésité avant de vous envoyer le script ! ” J’étais donc effectivement assimilé à ce type de personnages de gentils sans le savoir. Mais je me suis bien amusé à montrer que je pouvais jouer aussi un être atrocement cruel, et LEPRECHAUN a si bien marché que nous en avons tourné cinq suites ! Parallèlement, j’ai joué dans les nouveaux STAR WARS, puis incarné le professeur Filius Flitwick ainsi que Griphook, un gobelin franchement déplaisant, dans la saga Harry Potter. J’ai tenu des rôles très variés après LEPRECHAUN, ce qui prouve qu’un acteur doit essayer de se réinventer régulièrement. Je suis heureux d’avoir joué dans ces grandes franchises, tout en présentant des émissions de télé en Angleterre et en réalisant des documentaires. Mais je ne considère pas que WILLOW ait été un problème. Bien au contraire, il a été un tremplin formidablement positif, et m’a donné une notoriété qui m’a permis de mener une carrière d’acteur bien remplie.

Comment votre première rencontre avec Jonathan Kasdan s’est-elle déroulée ?

Elle a eu lieu pendant le tournage de SOLO, dans lequel je reprenais le rôle de Weazel que j’avais déjà tenu dans l’épisode I de STAR WARS : il s’agit d’un voleur passé dans le camp des rebelles. Quand mon épouse Samantha est venue nous rendre visite aux studios de Pinewood, à Londres, pour découvrir les décors du film. Jon est venu nous voir. Il s’était assuré qu’elle soit installée très confortablement sur le plateau pour pouvoir tout observer et voir les feedbacks des prises de vues sur les moniteurs, juste à côté de son fauteuil et de celui de son père Lawrence Kasdan, avec lequel il a co-écrit le script de SOLO. Sam et Jon ont commencé à parler de WILLOW, et il lui a dit qu’il était un grand fan du film et qu’il voulait tout faire pour prolonger cette histoire. Sam était enthousiasmée par cette idée, bien sûr, et moi aussi, quand je les ai rejoints entre deux prises de vues et que Jon m’en a parlé. Ce qui a tout fait basculer du bon côté, c’est l’arrivée de Ron Howard, quand il a repris en main la mise en scène de Solo. Nous avons discuté tous les trois, et Jon a décrit à Ron sa passion pour Willow. Ils se sont si bien entendus que Ron a accepté de soutenir ce projet de suite. Un jour, George Lucas est venu assister au tournage, alors que je jouais Weazel dans une scène en portant une perruque avec de longs cheveux et une barbe de trois jours, soit presque le même look que celui de Willow dans la série. Bref, comme Kathleen Kennedy était là aussi, nous avons organisé une réunion impromptue entre Kathy, Jon, Ron, George et moi, et l’idée de créer une suite de WILLOW a été abordée immédiatement. C’est George qui a suggéré “ Pourquoi n’en faites-vous pas une série ? ” Non seulement tout le monde était d’accord, mais Kathy nous a appris que ce projet pouvait être immédiatement intégré dans le planning de développement de Lucasfilm, et présenté à Disney+ dans la foulée. Quand des responsables de cette stature sont si enthousiastes, tout avance très vite. Jon a immédiatement commencé à rédiger des notes sur ce que la série devrait être, et nous les a envoyées. Parfois, certains projets tardent à décoller, mais cette série a été portée par une énergie incroyable. Celle de Jon bien sûr, mais aussi celle de l’univers ensorcelé de WILLOW qui ne demandait qu’a être exploré à nouveau. Assez rapidement, je me suis retrouvé au Pays de Galles, dans la peau et les vêtements du personnage, baguette en main, et prêt à prononcer ma première formule magique !

Qu’est-ce qui a changé dans votre interprétation de Willow ? Comment le personnage a-t-il évolué pendant les 35 ans qui se sont écoulés ?

La plus grande différence, c’est que j’ai vieilli ! Quand je l’ai interprété la première fois, j’étais un adolescent de 17 ans, et maintenant je suis un quinquagénaire. C’est presque pareil pour le personnage, dans la mesure où cette histoire se déroule vingt ans seulement après les événements du film. Willow est plus vieux, plus expérimenté, et a été confronté à des joies et des peines. Son monde a beaucoup changé et souffert, tout comme notre planète depuis l’époque de la sortie du film. Jon s’est inspiré de tout cela pour écrire ces épisodes, et je m’en suis servi dans mon interprétation.

Vous avez participé à plusieurs franchises de Fantasy, mais êtes-vous un vrai fan de ce genre ?

Oui, j’aime beaucoup la Fantasy. En grandissant dans les années 70/80, j’allais voir des films comme DARK CRYSTAL, LEGEND, LABYRINTHE ou la version animée du SEIGNEUR DES ANNEAUX, et ils ont eu un énorme impact sur moi. C’est vraiment une époque où la Fantasy se développait beaucoup, et WILLOW y a contribué également. À présent, au cinéma comme sur les nouvelles plateformes, la Fantasy revient en force, notamment sur Disney+ avec notre série. Et je dois dire que découvrir ces récits de magie et d’aventures héroïques en famille, sur le grand écran ou chez soi, est un merveilleux moyen de s’évader et d’oublier pendant un moment les problèmes du monde réel. Je crois que c’est ce que la fiction, au cinéma comme à la télévision, fait de mieux : nous entraîner dans des univers dans lesquels nous ne pouvons pas aller, nous donner l’impression de vivre des événements extraordinaires et d’être confrontés à la magie !

Les compagnons de Willow : Entretien avec Erin Kellyman (Jade) et Amar Chadha-Patel (Boorman)

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Pouvez-vous nous présenter vos personnages respectifs, Jade et Boorman, et décrire leurs relations avec Willow et le reste du groupe ?

Erin Kellyman :
Jade tente de devenir un des chevaliers du royaume de Galladoorn. Elle a grandi dans le château avec Kit, Erik et la reine Sorsha, et ils sont devenus sa famille, au fil des ans. Et tout naturellement, quand un grand danger menace le royaume et ces gens qu’elle aime, Jade décide de tout faire pour les aider. C’est ainsi qu’elle part pour retrouver Willow, qui détient des connaissances capitales pour lutter contre ces forces maléfiques.

Amar Chadha-Patel : Boorman est un aventurier un peu escroc, qui a tendance à semer le désordre quand il intègre une équipe. C’est un esprit libre et indépendant, qui fait passer son propre intérêt avant celui des autres. Il a toujours vécu ainsi, en se passant d’une famille, et de manière égoïste. Mais il va évoluer en participant au voyage qu’entreprennent Willow et ses compagnons, et découvrir qu’être entouré et soutenu est réconfortant. Il trouvera peut-être une famille en menant cette quête. Plus on voit Boorman agir au cours de cette histoire, plus on se dit que cette crapule, finalement, a peut-être un coeur d’or.

Et le sens de l’humour, aussi…

Amar Chadha-Patel :
(sérieux) Non… (rires) Effectivement, Boorman a tendance à tourner les choses en dérision, car cela lui permet de masquer ses sentiments, et de sembler indifférent. Mais ce n’est pas une attitude saine. Elle révèle sa peur de s’attacher aux autres.

Qu’appréciez-vous le plus dans les émotions, les motivations et l’evolution de vos personnnages au cours de cette adventure ?

Erin Kellyman :
Nos personnages sont transformés par les évenements qui se déroulent au cours de leur voyage. Ils sont confrontés à des échecs, des victoires provisoires et des mystères qui les contraignent à puiser en eux des ressources qu’ils ignoraient posséder…Ce que je préfère dans la personnalité de Jade, c’est son endurance et sa ténacité. Elle sait ce qu’elle veut, et se donne les moyens d’atteindre les objectifs qu’elle s’est fixés. J’ai pris beaucoup de plaisir à interpréter tout ce qu’elle apprend sur elle-même et sur les autres.

Amar Chadha-Patel :Je suis d’accord. Ce que j’apprécie particulièrement, c’est que personne ne “marche sur les pieds des autres” pendant cette aventure. Chacun des six compagnons évolue à sa manière au cours du voyage, et toutes sortes de sentiments et de situations se développent de manière vraiment intéressante. Au début, Boorman est une sorte de “monsieur je sais tout” amusant mais peu fiable, qui sait se battre si cela lui permet d’en tirer profit. Il croit tout savoir, mais comme les autres, il a encore énormément de choses à apprendre. Participer à l’aventure du tournage en le jouant a été une joie. Je dois avouer qu’au moment où j’ai lu les scripts des premiers épisodes et passé les auditions pour ce rôle, je n’étais pas certain de pouvoir apporter beaucoup de profondeur au personnage en l’interprétant. Mais après avoir été choisi, en lisant les scripts suivants, j’ai été surpris et me suis dit “Ahh, je vais pouvoir jouer aussi des scènes dramatiques…Parfait ! ”

Diriez-vous que la quête qu’entreprennent vos personnages ressemble un peu à votre expérience du tournage en extérieurs, dans les paysages du pays de Galles notamment ?

Amar Chadha-Patel :
Oui. C’était une quête dans la fiction comme dans la réalité !

Erin Kellyman : Nous avons tourné la série pendant six mois…

Amar Chadha-Patel : …Et avant, nous nous sommes tous entraînés physiquement pendant un mois. Soit sept mois de travail intensif en tout.

Erin Kellyman : Nous avons tourné des scènes intimistes dans des paysages enchanteurs, et aussi des séquences d’action épiques, à grande échelle. Et en coulisses, c’était également magique et épique à vivre !

Amar Chadha-Patel : Je crois que nous nous sommes tous lancés dans l’aventure de ce tournage en étant curieux de découvrir ce que cette expérience allait nous apporter, professionnellement et à titre personnel. Pour ma part, j’ai appris beaucoup sur mon endurance, ma résistance aux efforts physiques, et sur ce que je pouvais réussir à faire. Nous sommes tous partis en ayant cet état d’esprit, cette curiosité mêlée d’énergie positive, et très vite, dès le début du tournage, nous nous sommes rendu compte que tout devenait concret et que nous ne nous étions pas préparés physiquement pour rien ! (rires) Quand le défi n’était pas du registre des cascades, il s’agissait de scènes d’émotion avec de nombreuses nuances à exprimer. Il y avait toujours des challenges passionnants à relever.

Quel type d’entraînement physique avez-vous suivi pour vous préparer à tourner les scènes d’action ? Et quelles cascades avez-vous réalisées ?

Amar Chadha-Patel :
Je me suis transformé physiquement. Avant le tournage, j’étais plutôt maigre et pesais 72 kilos. Après notre entraînement intensif, je suis passé à 86 kilos en ajoutant 14 kilos de musculature, car il fallait que j’aie une carrure plus imposante pour jouer un guerrier comme Boorman. Je ne vous cache pas que tout ce processus a été difficile, mais je suis content d’avoir appris à me battre à l’épée et à monter à cheval. Après cela, quand le réalisateur me montrait un point du paysage et me disait, “Bon, Amar, tu vas arriver à cheval tout là-bas au sommet de cette colline, sauter à terre puis te battre à l’épée contre ces cinq gars ”, j’étais confiant, et je pouvais lui répondre OK et y aller en sachant que je serais capable de le faire. C’était une sensation grisante, très gratifiante. Certaines des scènes de bataille sont impressionnantes, vous verrez !

Erin Kellyman : Oui, comme Amar le disait, l’entraînement physique a diminué l’appréhension que l’on éprouve toujours avant le début d’un tournage, parce qu’il nous a permis d’avoir confiance en nous. C.C. Smiff, notre superviseur des cascades, s’est très bien occupé de nous. Nous savions que nous pouvions nous entraîner en lui faisant entièrement confiance. En passant sept mois ensemble, nous avons eu le temps de bien faire connaissance et de tisser des liens d’amitié qui nous ont aidés à interpréter nos personnages. C’est rare de disposer d’autant de temps pour travailler et développer des rôles, et je suis heureuse d’avoir eu cette chance. Bookmark and Share


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