Le jour où la terre s’arrêta : Entretien avec David Brisbin, Chef décorateur
Article Cinéma du Dimanche 21 Decembre 2008

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Le décorateur David Brisbin a collaboré notamment avec Gus Van Sant sur les films « Drugstore Cowboy » et « My Own Private Idaho », avec les frères Hughes sur « Dead Presidents », Matt Dillon sur « City of Ghosts » et Jane Campion sur « In The Cut ». Sa première prestation dans le registre du fantastique a été « L’exorcisme d’Emily Rose », réalisé par Scott Derrickson, qu’il a retrouvé pour cette nouvelle version du « Jour où la terre s’arrêta ». Effets-speciaux.info s’est longuement entretenu avec David Brisbin pour évoquer le véritable défi que représente cette nouvelle vision d’un classique de la SF.

Quand avez-vous vu pour la première fois « Le jour où la terre s’arrêta » et quelles furent vos impressions à ce moment-là ?

Je l’ai vu pour la première fois quand j’avais une vingtaine d’années. J’étudiais dans mon école de cinéma, et j’ai le vague souvenir de l’avoir regardé un peu distraitement à la télévision, par intermittence, tout en révisant un cours. Je dois avouer que je n’ai pas pris le temps d’écouter le message du film à ce moment-là. J’avais juste gardé en tête ces images qui reflétaient la manière dont on pouvait imaginer un vaisseau spatial futuriste et un robot, au début des années 50. Pour être honnête, j’avais trouvé que la soucoupe volante et le robot étaient traités comme des clichés de Science-Fiction typiques de cette époque. C’était sans doute un jugement hâtif et superficiel, dû au fait que je n’avais regardé le film que d’un œil, en faisant autre chose. Quand j’ai revu « Le jour où la terre s’arrêta » quelques années après, j’ai été frappé par la qualité du film, et par les sujets importants qu’il abordait. Je l’ai découvert pleinement à ce moment-là. Et l’aspect un peu naïf du vaisseau, du robot ou de la tenue de Klaatu ne m’a plus gêné. Je trouve même tout cela très attachant. On sent que l’équipe du film de 1951 a fait un bel effort pour concevoir et construire ces évocations d’une civilisation très avancée avec les moyens disponibles à l’époque.



Leur approche fait penser à ces évocations du futur que l’on pouvait voir dans les expositions universelles des années 40 et 50...

Exactement. Etant donné que ma formation initiale était l’architecture, j’avais une bonne connaissance de l’esthétique du début du vingtième siècle, des styles « art déco » et « streamline » que l’on utilisait pour concevoir des bâtiments et des véhicules aux lignes épurées. Les designers du film original ont voulu appliquer ce style moderne à l’aspect du vaisseau et du robot, ce qui était une approche intéressante. Mais ils ont utilisé des formes des années 30 et 40 pour représenter des éléments sensés avoir été construits par une civilisation bien plus avancée que la nôtre, ce qui est un peu un contresens. On peut regretter qu’ils ne soient pas allés plus loin, conceptuellement, dans leur manière de concevoir le vaisseau et Gort. Si Jules Verne ou H.G. Wells avaient participé au film en 1951, je suis sûr qu’ils auraient suggéré des concepts d’astronefs et de robots beaucoup plus étonnants. Ces petites remarques mises à part, je trouve que la démarche de l’équipe du film original est tout à fait respectable et sympathique, et correspondait bien à la vision Hollywoodienne de la Science-Fiction dans les années 50, et aux attentes du grand public.

Avez-vous été un peu intimidé par la perspective de travailler sur la nouvelle version d’un classique de la Science-Fiction, adoré par les fans du genre ?

Quand j’ai commencé à travailler sur le film, Scott Derrickson et moi avons eu de longues conversations sur les thèmes évoqués par cette histoire. J’avais fait les décors d’un autre film pour Scott, « L’exorcisme d’Emily Rose », et je le connaissais déjà très bien. Au tout début, j’ai pensé que ce projet était relativement peu risqué, car le studio avait clairement laissé carte blanche à Scott pour faire le film qu’il avait en tête et non pas un simple remake du film de 1951. Il était donc libre de traiter l’histoire comme il le souhaitait, et de l’adapter comme bon lui semblait aux thèmes de notre époque et au public actuel. Mes préoccupations au sujet des attentes des fans du film original ont débuté un peu après. J’ai toujours eu beaucoup de respect pour le travail de réalisateur de Robert Wise, mais au début, le mot d’ordre était « Nous allons faire quelque chose de nouveau ». Cependant, en parlant du projet avec les illustrateurs et les storyboardeurs que nous avons engagé pour faire les recherches graphiques, ainsi qu’avec les gens que nous rencontrions pendant les repérages des décors, nous avons commencé à nous rendre compte de la ferveur que suscitait le film. On nous disait souvent « Ah, ce film est formidable ! C’est un vrai joyau ! ». Je me souviens notamment de la réaction d’une secrétaire que nous avons rencontrée dans un grand bâtiment industriel qui nous intéressait. Elle nous a dit : « Vous faites une nouvelle version du « Jour où la terre s’arrêta » ?! Eh bien messieurs, vous avez intérêt à ne pas vous planter ! » (rires) Des remarques comme celle-ci, nous en avons entendu des centaines ! Les gens considèrent vraiment le film comme un des trésors du cinéma de Science-Fiction. Même si notre mission était d’imaginer à nouveau cette histoire, nous avons compris que nous devions faire plaisir à tous les cinéphiles qui sont très attachés au film original. Le défi à relever est devenu beaucoup plus important quand nous avons pleinement mesuré le degré de popularité de l’œuvre de Robert Wise.

Les images les plus célèbres du film original sont basées sur des formes géométriques simples, comme la soucoupe volante de Klaatu, l’intérieur du poste de commande, et l’aspect lisse de Gort. Dans cette nouvelle version, vous avez aussi utilisé des formes pures, comme le vaisseau qui est une sphère…

Je crois que si une civilisation très avancée conçoit des objets ou des véhicules, elle ira naturellement vers des formes extrêmement simples et des contours épurés. Je crois que ce concept est bien répandu dans notre culture. On a pu voir cette approche stylistique appliquée à beaucoup de produits issus de l’architecture et de l’industrie, depuis les années 1920 jusqu’à aujourd’hui. Ce souci de pureté des lignes se retrouve comme vous le dites dans le film original, et aussi dans le design des ordinateurs Macintosh dont nous nous servons aujourd’hui. Dès le début de notre projet, nous avons réalisé que ce choix de l’équipe artistique de Robert Wise était encore le meilleur aujourd’hui. Nous savions que c’était la voie à suivre, même si nous avons débattu de beaucoup d’idées différentes. Pour être précis, la forme sphérique du vaisseau de Klaatu figurait déjà dans la toute première version du script, et Scott était convaincu d’emblée que c’était le bon concept. A ce sujet, je me souviens qu’une personne qui était venue assister au tournage m’avait dit « Mais pourquoi n’avez-vous pas réutilisé la soucoupe volante du premier film ? Tous les fans la connaissent et l’aiment bien ». J’ai réfléchi à cette suggestion, et je me suis dit que si nous faisions cela dans un film de 2008, cela produirait un effet comique ! Si on voyait une soucoupe volante se déplacer au-dessus de New York, les spectateurs se mettraient aussitôt à pouffer de rire. Ce serait désastreux, parce que le thème du film est un sujet très sérieux et très actuel.

Et le nouveau Gort ? Comment l’avez-vous conçu ?

Ah ! Il a été bien plus difficile à imaginer… Pour être franc, nous avons longtemps rechigné à lui donner une forme anthropomorphique, en dépit de la célébrité du Gort original…

Pour quelles raisons ?

A cause des nouveaux événements décrits dans le scénario, et de la façon dont Gort y participe. Nous avons hésité à donner à la fois à Klaatu et à son robot des formes humanoïdes. Nous nous sommes alors lancé dans des recherches approfondies sur différentes options de design, en faisant travailler différents illustrateurs et plusieurs studios d’effets visuels qui nous ont présenté des modélisations et ont même fait, dans certains cas, des tests d’animation avec leur version du personnage. Nous sommes allés assez loin dans le développement de formes non-humaines, et après avoir consulté des savants et des experts en robotique, nous nous sommes posé aussi la question de la taille qu’il fallait donner à Gort, et de sa forme, par rapport au cadre cinémascope du film. C’était un processus long et difficile, mais vraiment passionnant. Après avoir poussé cette réflexion aussi loin que possible, nous en avons déduit que c’était vraiment un design humanoïde, comme celui du film original, qui conviendrait le mieux à notre projet. Le nouveau Gort a donc une silhouette globalement « humaine ». Mais il a des capacités différentes de l’ancien Gort, ce qui nous permet de créer des surprises dans l’histoire.

Est-il plus grand que le Gort original ?

Beaucoup plus !

Quelle est sa taille ?

Disons qu’il est aussi grand que le cadre le nécessite ! (rires) Pour être plus précis, il est sensé mesurer de 10 à 12 mètres de hauteur, mais sa taille dans l’image évolue en fonction de l’impact visuel que nous cherchons à obtenir, plan par plan.

Vous avez donc utilisé la même astuce que dans le « King Kong » de 1933…Les réalisateurs ont considérablement agrandi Kong dans les scènes qui se passent à New York, pour qu’il ne paraisse pas petit à côté des immeubles…

C’est exactement ça.



Que vous a dit Scott Derrickson quand il vous a expliqué sa vision du film la première fois ?

Il m’a expliqué sa vision en deux mots : « Tension et émerveillement ».

Intéressant ! C’est un bon programme !

Scott sait être très concis et très précis quand il vous explique la manière dont il imagine les choses. Il m’a dit ça au bout de dix minutes, pendant notre première conversation au sujet du film. En fait, il fallait qu’il réussisse à me convaincre de participer au projet, parce que j’avais déjà pris des engagements par ailleurs. J’avais obtenu une donation du gouvernement canadien pour participer à un comité de réflexion fascinant sur l’avenir des techniques du numérique dans le cinéma et les médias électroniques. J’avais déjà commencé mon travail, qui devait se poursuivre encore pendant plusieurs mois, quand Scott m’a téléphoné pour me dire « Daniel, il faut que tu abandonnes tout et que tu viennes travailler avec moi » ! Alors que j’étais très réticent, j’ai compris qu’il fallait que je participe à ce film au bout de quelques minutes…

Quels sont les principaux décors du film ? Comment les avez-vous adaptés au format « cinemascope » ?

Le décor le plus grand s’appelle « La salle de flashage ». Il est situé dans un environnement industriel. Dans le film, le gouvernement américain essaie de trouver un moyen astucieux de se débarrasser de Gort. L’idée de ce lieu nous est venue en entendant parler d’une installation d’un laboratoire américain qui étudie les virus et maladies mortelles. Quand ils étudient un singe infecté avec le virus Ebola, ils se débarrassent de sa dépouille en la plaçant dans une salle spéciale. Elle est ensuite détruite grâce à une mini-explosion nucléaire – surnommée un flash - qui désintègre absolument toutes les molécules de la carcasse, et permet d’être sûr que ses résidus ne sont plus contagieux. Dans notre film, nous avions besoin d’un espace très grand, car le nouveau Gort est énorme. Nous avons réfléchi aux installations dont dispose le gouvernement, et qui pourraient être aisément transformées en « salles de flashage », et nous avons pensé aux silos vides, qui abritaient jadis des missiles nucléaires. La forme d’un silo étant celle d’un tube géant, on pouvait obtenir une forme horizontale allongée qui convenait parfaitement à un cadrage cinémascope en regardant en vue plongeante et en étant décalé sur le côté. Il y a aussi un autre décor que j’aime bien. Nous sommes partis du principe que le gouvernement devait avoir créé des équipements mobiles spéciaux pour s’occuper de situations imprévisibles comme ceux que nous décrivons dans le film. Nous avons évoqué ce sujet avec des responsables du ministère de la défense, et ils nous ont parlé des structures scientifiques et militaires destinées à être installées sur un site en cas de contamination bactériologique. Ces équipements doivent pouvoir être mis en place n’importe où, dans des délais très brefs, pour que les gens puissent être à pied d’œuvre le plus rapidement possible. On y trouve notamment un bloc médical mobile, placé sous haute sécurité, ainsi qu’une salle de chirurgie complète. Nous avons alors imaginé une sorte de tente militaire géante, avec des infrastructures qui ressemblent aux côtes d’une cage thoracique, recouvertes par des membranes étanches. Nous avons pensé que pour pouvoir intervenir en toute sécurité, cette installation top secret devrait certainement être montée dans un lieu fermé, que l’on pourrait facilement entourer d’un cordon de sécurité, comme une usine désaffectée ou un bâtiment militaire. Il y a beaucoup de bâtiments militaires sur le territoire américain, et ils sont généralement équipés d’un gymnase, afin que les troupes présentes sur place puissent s’y maintenir en forme. C’est l’endroit que nous utilisons dans le film. Une base militaire installée sur une colline, à l’écart de la ville. Et notre tente est montée dans le gymnase. Elle est protégée à l’intérieur de cette « matrice » militaire.

C’est dans cet endroit que Klaatu est retenu par l’armée ?

Oui. C’est là qu’il est opéré et qu’ont lieu les examens médicaux qu’on lui fait subir.

Quels sont les autres décors que vous avez construits ?

La maison du professeur Barnhardt. Nous avons trouvé une vraie maison pour représenter l’extérieur, mais nous avons dû construire l’intérieur en studio, car il y a une interaction assez compliquée avec un hélicoptère qui atterrit devant, au cours d’une scène. Nous avons également construit une grande quantité de décors naturels en plateau, car l’action imaginée par Scott exigeait que l’on ait un contrôle total des éléments et de la lumière. Au début du film, on peut voir des gens qui se trouvent dans les montagnes de l’Himalaya, d’autres qui sont en train de travailler dans des vergers que nous avons reconstitués, etc. Je ne m’attendais pas à reconstituer autant de scènes de nature en studio. Une des autres raisons qui nous a poussé à faire cela, c’est qu’un des rôles principaux est tenu par le jeune Jaden Smith, le fils de Will Smith. Etant donné que les heures de lumière naturelle sont très limitées pendant l’hiver Canadien, et qu’on ne peut pas faire tourner un enfant comme Jaden plus de quelques heures par jour, il était très intéressant de reconstituer certains décors extérieurs en studio, afin de bénéficier d’un éclairage optimal à tout moment, quelle que soit l’heure, et quelles que soient les conditions météo. Certaines des scènes les plus importantes du film se passent en extérieurs, et ces décors ont été bien utiles pour respecter les délais de tournage prévus.

Comment concevez-vous vos décors ? Réalisez-vous des dessins à la main et des maquettes, ou faites-vous des illustrations numériques et des modélisations 3D ?

Comme je viens de l’architecture, et que l’ingénierie fait partie de ma formation, je réalise toujours des dessins très précis et très méticuleux de mes décors et de leurs structures. Dans le cas de ce projet, étant donné la complexité de certaines scènes, nous avons été amenés à faire faire de nombreuses illustrations en perspectives, et à fabriquer des maquettes de certains décors, comme la « salle de flashage » et la maison du Docteur Barnhardt. Même si cela demande beaucoup de travail, toutes ces approches préparatoires coûtent beaucoup moins cher que de modifier un décor que l’on a déjà construit, et dans lequel on doit faire des aménagements à la dernière minute. Mais je dois ajouter que sur « Le jour où la terre s’arrêta », je me suis résolu à passer du travail au crayon sur papier à l’étape numérique. Donc même si j’ai dessiné les décors de manière traditionnelle, j’ai en revanche demandé à tous les illustrateurs de nous fournir des dessins numériques, à la fois parce qu’il est beaucoup plus facile de modifier les coloris et les détails d’une illustration 2D que ceux d’un dessin sur papier, et aussi parce que tous ces travaux allaient devoir être envoyés par mail des USA au Canada où le tournage se préparait, puis de chez nous aux studios Fox de Los Angeles.

Quels sont les petits détails de vos décors que vous aimez le plus ?

L’un des éléments les plus importants pour moi est la manière dont l’éclairage est intégré aux décors. Le cinéma, c’est la lumière. C’est avec la lumière que l’on crée l’espace avec lequel on raconte l’histoire. Quand on conçoit un environnement, il faut donc songer aussi à la manière dont on va dissimuler les projecteurs pour que la lumière fasse vraiment partie intégrante de l’ambiance que l’on veut créer. Il peut s’agir de projecteurs de type « lumière du jour », qui sont placés devant des fenêtres ou des portes vitrées, ou bien de sources d’éclairages plus discrètes, qui mettent en valeur certains éléments du décor sans que l’on puisse voir où elles sont situées. Mais le travail du décorateur peut aussi consister à trouver des endroits préexistants qui offrent des possibilités intéressantes au niveau de l’éclairage. Il y a un exemple de cela dans le film : la salle dans laquelle a lieu l’interrogatoire de Klaatu. J’ai dû me battre pour que l’on tourne là. Il s’agissait d’une salle énorme, abandonnée depuis longtemps, et située dans le sous-sol d’un bâtiment industriel que nous étions venu visiter. Il y avait de longues barres de supports de tubes néons qui couraient sur toute la longueur du plafond. Quand nous l’avons visitée, certaines barres s’étaient détachées et traînaient sur le sol, qui était encombré de tas de déchets divers et de saletés. Mais malgré cet aspect lamentable des lieux, j’ai tout de suite compris le parti que l’on pourrait en tirer visuellement. Et ça a très bien marché. C’est d’ailleurs un des premiers plans du film qui a été montré dans la bande-annonce. Je voudrais ajouter que j’ai eu la chance de travailler avec un chef opérateur formidable sur ce film : David Tattersall. Un génie de la lumière, qui m’a aidé à résoudre beaucoup de problèmes.

Vous demande-t’on souvent de cacher des projecteurs et des sources d’éclairage dans vos décors ? Quelles astuces utilisez-vous pour les camoufler ?

Oui, très souvent. Et le pire, ce n’est pas vraiment de cacher les projecteurs, mais leurs câbles d’alimentation ! il faut concevoir des éléments du décor qui vont vous permettre de cacher des kilomètres de câbles épais, ce qui n’est pas évident. Par exemple, dans le décor de la salle d’interrogatoire dont nous parlions, et dont les parois en béton sont lisses, j’ai été obligé de suspendre tous les câbles en haut des murs latéraux, contre le plafond, et de les recouvrir avec des tuyaux souples chromés, qui reflètent la lumière des autres néons. Du coup, les câbles sont invisibles et personne ne les remarque. Quand le décor a été installé, on m’a même souvent dit « Oh, c’est sympa comme endroit. C’est chouette que vous ayez trouvé un lieu avec deux grands tuyaux chromés sur toute la longueur du plafond ! ». (rires)

Comment avez-vous conçu l’intérieur du vaisseau de Klaatu ?

Ah…C’est une question embarrassante…Il va falloir que vous alliez voir le film pour obtenir une réponse, car c’est directement lié aux nouveaux éléments de l’histoire. Nous avons considéré que l’intensité dramatique et le mystère autour de Klaatu étaient considérablement renforcés si nous n’expliquions pas exactement ce qui se passe là. Depuis le premier film, on a pu voir un nombre considérable d’intérieurs de vaisseaux spatiaux, que ce soit dans « 2001, l’odyssée de l’espace », « Star Wars », « Rencontres du troisième type », « Alien », « Star trek », etc… Franchement, je ne crois pas qu’une approche traditionnelle de plus aurait apporté grand’chose…

Quelles ont été les principales difficultés de ce projet ?

Les modifications du plan de tournage, dues à la météo désastreuse que nous avons subie pendant pratiquement toute la production. En conséquence de cela, l’ordre de construction des décors, leur montage et démontage ont été bouleversés très souvent, et nous avons dû nous y adapter en travaillant très vite. Au moment où nous tournions, tous les plateaux de Montréal étaient occupés. Faute de place, et à cause de ses bouleversements, nous avons souvent été contraints de tourner un décor, de le démonter, de monter à la place le décor précédent, puis de remonter le décor de la scène suivante !

Comment avez-vous collaboré avec l’équipe des effets visuels sur les extensions de décors ?

Il y a beaucoup d’extensions de décors dans le film. Nous commencions d’abord à préparer la scène sous forme de storyboard, nous choisissions le lieu où nous allions tourner s’il s’agissait d’un décor extérieur, ou nous préparions le décor à construire en studio, puis nous discutions avec Jeffrey Okun, le superviseur des effets visuels. C’est alors que nous choisissions si nous allions utiliser un fond bleu ou vert en fonction des trucages qu’il allait ajouter, ainsi que l’emplacement des points de repères appelés « marqueurs » qui allaient lui permettre ensuite de détecter les perspectives pendant les mouvements de caméras. L’un des décors qui a été le plus prolongé en 3D est celui du silo de la « salle de flashage ». Nous avons construit la plateforme de la partie intermédiaire, mais tout ce qui se trouve au-dessus et en-dessous a été crée en 3D par l’équipe de Jeffrey Okun. Nous avons refait ce décor pour montrer ce qu’il en reste après l’explosion nucléaire. Les surfaces sont calcinées, les éléments métalliques tordus et fondus. Jeffrey de son côté a représenté les flammes de l’explosion et a animé Gort qui est représenté en 3D dans cette scène.

Avez-vous inclus certains effets spéciaux directement dans vos décors ?

Oui. Nous avons construit les portes hydrauliques du silo, qui fonctionnent réellement, mais avec des moteurs électriques. Dans d’autres décors, il y a des effets d’explosions et d’incendie, avec de grandes flammes, des bris de verre aussi. Il y a aussi d’autres sphères dans le film, en plus de celle qui sert de vaisseau à Klaatu. Certaines de ces sphères plus petites ont été construites réellement, afin de permettre aux acteurs - notamment Keanu Reeves/Klaatu - de les toucher. Par la suite, ces sphères ont été « habillées » avec des effets 3D pour avoir une apparence proche de celle de la grande sphère principale.

Quand vous songez à ce film, quelles sont les anecdotes qui vous reviennent tout de suite en tête ?

Il y en a beaucoup, parce que j’ai travaillé pendant plus d’un an sur ce film. Celle qui me revient en tête est également liée au précédent film de Scott Derrickson, « L’exorcisme d’Emily Rose ». Laura Linney, qui jouait l’un des rôles principaux, devait entrer dans une ferme occupée par des dizaines et des dizaines de chats. Comme nous savions que Laura était allergique aux poils de chats, nous savions que nous allions devoir être extrêmement prudents. Nous avons trouvé une ferme qui correspondait bien à ce que nous cherchions, et comme elle était réellement infestée de chats, nous l’avons nettoyée de fond en comble, puis nous avons fermé avec des bâches plastiques toutes les pièces que nous n’allions pas filmer. Dans celles qui allaient servir au tournage, nous avons nettoyé une seconde fois à fond, retiré tous les tapis, aspiré les poussières, lavé les murs, retiré le papier peint, tout repeint, amené des tapis et des meubles neufs, et utilisé des accessoires que nous avons apportés, et qui n’avaient jamais été en contact avec des chats. Le jour J, dès que Laura est entrée dans le décor, elle a été aussitôt victime d’une violente réaction allergique! La pauvre n’a même pas pu répéter la scène. J’étais désespéré ! Nous avons été contraint d’abandonner cet endroit et de construire un décor similaire en studio à la fin du tournage, pour pouvoir tourner la scène…Donc à présent, j’associe « problème d’allergie » à tout tournage avec Scott Derrickson ! Dès qu’il m’a contacté pour « Le jour où la terre s’arrêta », j’ai demandé à être informé des allergies éventuelles de tous les acteurs principaux. Nous devions tourner une scène qui se situe en forêt avec Jennifer Connelly, au cours de laquelle elle voit Klaatu interagir avec une sphère. Comme je vous l’expliquais auparavant, nous avons décidé de construire les décors naturels en studio, et ça a également été le cas pour ce décor de forêt. Une fois qu’il a été achevé, et que les arbres ont été plantés, la plan de tournage a été modifié une fois de plus. Il a fallu repousser la scène d’une semaine, puis d’une autre semaine, et encore de quelques jours supplémentaires. Pendant ce temps, il fallait que nous entretenions les plantes pour qu’elles ne meurent pas. La nuit précédant le tournage, je suis allé inspecter le décor et tout était en bon état. Le lendemain matin, en arrivant sur le plateau, nous nous sommes rendu compte que les petites cosses qui se trouvaient sur les branches des arbres les plus grands éclataient en libérant des nuages de pollen ! Toute l’équipe s’est mise à éternuer et à tousser ! J’étais anéanti ! (rires) Je me suis mis à transpirer comme une fontaine, et quand Jennifer est arrivée, j’avais le cœur qui battait à tout rompre. La malédiction se répétait ! Heureusement, Jennifer n’a pas du tout été gênée, et nous avons pu filmer la scène comme prévu, malgré cette mauvaise surprise de dernière minute !

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