Rogue One : A Star Wars Story - À l’assaut de l’Étoile noire en fin d'année
Article Cinéma du Mercredi 13 Avril 2016

Si le grand public attend de pied ferme la suite des aventures de Rey et Finn, c’est un tout autre genre de «Star Wars» qui nous attend dans neuf mois. En effet, pour la première fois, la saga délaisse la famille Skywalker afin d’explorer un aspect méconnu de la galaxie lointaine. La guerre, la vraie, sera au programme, le 14 décembre prochain. Une guerre pour l’Étoile noire…

Pierre-Eric Salard



En réalité, ce n’est pas tout à fait la première fois que Lucasfilm propose des œuvres « non numérotés ». Dès les années 1970, George Lucas envisageait des opus autonomes, dédiés aux Jedi, aux wookies ou aux droides. Une idée qui fera long feu. En 1978, il y eut le regrettable téléfilm Au temps de la guerre des étoiles (The Star Wars Holiday Special), de sinistre mémoire. Au milieu des années 1980, deux téléfilms seront consacrés aux Ewoks. En 2008, le long-métrage The Clone Wars fait office de (décevant) pilote à la (réjouissante) série éponyme. Mais ces projets ne possédaient pas l’envergure des «épisodes». Cette fois-ci, sous le patronage de Disney, Lucasfilm s’apprête à nous proposer des superproductions qui s’affranchissent des règles de la saga, telle que nous la connaissons. Ces films autonomes ne seront pas numérotés ; ils appartiennent au label «A Star Wars Story». Ainsi Rogue One sera-t-il un film de guerre abordant la manière dont l’Alliance Rebelle s’est procuré les plans de l’Étoile noire. En alternance avec l’histoire de la famille Skywalker, Lucasfilm compte donc produire, une année sur deux, un film explorant des aspects divers de la galaxie Star Wars. Or Rogue One est d’ores et déjà annoncé comme le film le plus attendu de l’année 2016 – devant Le Monde de Dory, Batman v Superman et Jason Bourne. C’est ce qu’indique un sondage réalisé pour le compte de Fandango, l’une des principales sociétés de vente de billets de cinéma aux États-Unis. Lucasfilm n’ayant pas encore initié la promotion de Rogue One, ce résultat peut évidemment s’expliquer par l’attente suscitée par l’Épisode VIII. Malgré tout, le Star Wars des fêtes de Noel, aussi différent soit-il des sept précédents épisodes, risque de rencontrer un franc succès…

Le retour du macguffin

L’origine de Rogue One remonte à l’automne 2012, peu après que Kathleen Kennedy ait pris le relais de George Lucas à la tête de Lucasfilm. The Walt Disney Company venait d’annoncer la production d’une troisième trilogie Star Wars. John Knoll (Willow, Avatar), l’un des principaux responsables du studio d’effets visuels Industrial Light & Magic (et accessoirement cocréateur du logiciel Photoshop), frappe à la porte de la nouvelle dirigeante. «J’avais simplement cette petite idée à propos des espions rebelles qui ont volé les plans de l’Étoile noire, mentionnés dans le texte déroulant d’Un Nouvel espoir», se souvient John Knoll. Kathleen Kennedy, qui sait immédiatement à quoi il fait référence, donne peu après son feu vert. Il s’agit tout simplement de montrer les événements décrits dans le texte – les mots découverts par les tout premiers spectateurs, en 1977. «C’est une époque de guerre civile», pouvait-on lire en France (le texte fut maintes fois altéré). «À bord de vaisseaux spatiaux opérant à partir d’une base inconnue, les Rebelles ont remporté leur première victoire sur l’abominable l’Empire galactique. Au cours de la bataille, les Rebelles ont réussi à dérober les plans secrets de l’arme absolue de l’Empire : l’ÉTOILE NOIRE, une station spatiale dotée d’un armement assez puissant pour annihiler une planète tout entière». Ce texte ne servait qu’à introduire le concept de qui s’intitulait alors La Guerre des étoiles, ainsi que le macguffin initiant la dynamique de l’intrigue. Les plans de l’Étoile noire, dissimulés dans R2-D2, ne sont qu’un prétexte pour le développement du récit. Après avoir pris possession du droide, Luke Skywalker se chargera de l’emmener auprès de l’Alliance Rebelle, avant de détruire lui-même la gigantesque station spatiale – et ainsi entamer son parcours initiatique. John Knoll propose donc de revenir aux sources de la saga en faisant appel au même macguffin. À l’avenir, pour les jeunes générations, Un Nouvel espoir sera peut-être perçu comme la seconde moitié d’une mission rocambolesque. Qui sait ? En février 2013, Bob Iger, le PDG de Disney, annonce le développement de deux films dérivés, sous l’égide des scénaristes Lawrence Kasdan (Le Réveil de la Force) et Simon Kinberg (X-Men : Days of Future Past). En réalité, plusieurs pistes sont à l’étude, dont un film consacré à Han Solo (prévu, donc, pour 2018) et au chasseur de primes Boba Fett (non annoncé officiellement, ce film pourrait sortir en 2020, après l’Épisode IX). «Les films dérivés offrent l’opportunité d’explorer de nouveaux personnages, de nouvelles histoires et une grande variété de genres au sein de l’univers Star Wars», précise Kathleen Kennedy, qui choisit finalement Rogue One comme galop d’essai. En mai 2014, le réalisateur Gareth Edwards (Monsters, Godzilla) est recruté, ainsi que le scénariste Gary Whitta (The Book of Eli). Les deux cinéastes collaboreront près d’un an sur le projet, avant que Chris Weitz (A la croisée des mondes : La boussole d’or) soit engagé pour écrire une nouvelle version du script. En mars 2015, alors que le compositeur français Alexandre Desplat est appelé à prendre la suite de John Williams, le titre est dévoilé. Les fans de la saga imaginent instantanément que le film sera consacré à l’escadron Rogue, qui rassemble les meilleures pilotes de l’Alliance Rebelle. En avril, Lucasfilm douche les espoirs de certains fans. Rogue One racontera l’histoire des «soldats de la résistance qui se sont unis pour voler les plans de l’Étoile noire». Il apparaît rapidement que Gareth Edwards a souhaité reproduire le design d’univers qui a vécu, tel que nous l’avions découvert dans la trilogie originale. Même si Rogue One est une préquelle, la galaxie n’est déjà plus celle, rutilante et prospère, de la prélogie. Le cinéaste cherche en outre à s’extraire du manichéisme inhérent à la saga : dans une guerre, personne n’est réellement gentil ou méchant. Tout dépend des événements et du point de vue. «Ce sont les réalités de la guerre», ajoute Gareth Edwards. «Un contexte complexe et riche au sein duquel nous inscrivons notre film». «Rogue One sera différent des films de la saga, mais possédera des éléments familiers de l’univers Star Wars», précise Kathleen Kennedy. Il n’y aura effectivement aucun Jedi pour épauler les Rebelles : l’Ordre fut décimé deux décennies plus tôt, durant La Revanche des Sith (2005). Écartant le fil narratif du parcours initiatique d’un héros, Rogue One lorgne plutôt du côté des films de guerre : La Chute du faucon noir, Il faut sauver le Soldat Ryan, mais aussi Les Douze salopards. «Ce film va explorer un nouveau territoire, selon une perspective inédite : la lutte galactique, sur le terrain», poursuit Kathleen Kennedy. «Nous faisons essentiellement un film d’époque», s’amuse Kiri Hart, responsable du développement au sein du Story Group de Lucasfilm. Le nom de code de Rogue One est d’ailleurs Los Alamos – une probable référence au laboratoire de recherche sur les armes nucléaires, dont fut issu le Projet Manhattan, durant la Seconde Guerre mondiale. Un possible indice sur l’intrigue du film ? Notons que, même si l’information n’a pas été confirmée, Christopher McQuarrie (The Usual Suspects, Mission : Impossible 5) aurait peaufiné – deux semaines durant – le script. «Gareth Edwards est un cinéaste novateur», poursuit Kathleen Kennedy. «Je suis très heureuse de travailler avec lui, ainsi qu’avec l’extraordinaire distribution qu’il a sélectionnée». Un casting mené par la talentueuse Felicity Jones (The Theory of Everything).

Une nouvelle perspective

Une jeune têtre brûlée, Jyn Erso (Felicity Jones), mènera donc une bande hétéroclite de soldats et mercenaires. Des résistants interprétés par Diego Luna (Milk, Elysium), Donnie Yen (Ip Man), Jiang Wen (Les Démons à ma porte) et Riz Ahmed (Four Lions) – dont le personnage pourrait s’appeler Bodhi Rook, selon le site de son agent. Alan Tudyk (Serenity), lui, endosse un costume de motion capture pour incarner vraisemblablement un droide. L’acteur faillit cependant refuser le rôle. «Quand Gareth me l’a proposé, cela m’a semblé irréel», se souvient-il. «Mais nous allions filmer ma série Con Man». Grâce à la nature de son personnage, la présence d’Alan Tudyk n’est pas nécessaire, sur les plateaux. Le comédien précise cependant qu’il a partagé la plupart de ses scènes avec Felicity Jones et Diego Luna. Les autres rôles ont notamment été attribués à Ben Mendelsohn (Animal Kingdom), Forest Whitaker (Le Dernier Roi d’Écosse) et Jonathan Aris. «Jouer dans ce film est un grand honneur», déclare Ben Mendelshohn, qui semble incarner un illustre responsable au sein de la hiérarchie impériale. «C’est extraordinaire d’avoir la chance de mettre un coup de pinceau sur ce monde. Attendez-vous à quelque chose d’unique». L’acteur danois Mads Mikkelsen (Casino Royale) joue un personnage «important». Et, selon lui, «pas méchant». Ce qui ne signifie pas forcément qu’il se trouve dans les rangs de l’Alliance rebelle. Donnie Yen, lui, se déclare enthousiaste : «C’est très flatteur d’être le premier acteur chinois à jouer dans un Star Wars ! En plus, mon personnage est foncièrement gentil». Et probablement aveugle. Le mannequin écossais Eunice Olumide a également participé au tournage de Rogue One. «Je n’ai aucune ligne de dialogue, mais ce fut une expérience incroyable», s’amuse la jeune actrice, qui dit incarner une responsable de l’Alliance Rebelle. «Dans une scène, un tank se dirige vers moi avec vingt stormtroopers ! Les décors sont gigantesques. C’était comme marcher sur une autre planète». Notons enfin la présence d’une quarantaine de (véritables) soldats sur les plateaux de tournage : leur expérience du combat et leurs capacités physiques permettent d’ajouter de l’authenticité aux scènes d’action. Gareth Edwards, lui, a eu l’opportunité d’utiliser les premiers outils mis au point par ILMxlab pour prévisualiser certaines scènes du film, à l’aide d’un casque de réalité virtuelle Oculus Ruft. Contrairement à ses collègues réalisant les nouveaux « épisodes », le cinéaste a préféré filmer une majorité de scènes à l’aide de caméras numériques Alexa 65, mises au point par Arri. Début août 2015, le tournage débute donc au sein des studios Elstree, en Angleterre. À Cardington, un ancien hangar à dirigeable aux dimensions démesurées abrite un gigantesque décor. Mais la plus grande partie du film est réalisée sur sept plateaux, disséminés dans les studios Pinewood – le quartier général britannique de Lucasfilm. Une planète tropicale y est notamment recréée. «À Pinewood, j’avais l’impression d’être quotidiennement dans un parc d’attractions», s’exclame Donnie Yen. Le responsable du département des créatures, Neal Scanlan, promet que les aliens du film s’inscriront dans une certaine réalité. «Gareth les imaginait intégrés au sein du monde des humains. Ils cohabitent et travaillent ensemble». À la mi-septembre, les prises de vues se poursuivent dans les montagnes islandaises. Début novembre, le sculpteur Brian Muir – qui avait construit le masque de Dark Vador pour Un Nouvel espoir – annonce qu’il rejoint la production, à Pinewood. Ce qui conforte une rumeur tenace : l’apparition de Dark Vador. Après tout, l’intrigue se prête parfaitement à un retour du méchant emblématique de la saga ! Peu après, les images volées d’un X-Wing T -65 (le modèle originel), peint en noir, apparaissent sur Internet. Fin novembre, l’équipe du tournage déménage, le temps d’une semaine, au sein de l’archipel des Maldives – et plus particulièrement sur deux îles inhabitées de l’atoll Laamu. Selon Bog Iger, les prises de vues de Rogue One étaient « virtuellement » terminées en début d’année. Parions qu’il reste quelques scènes à terminer à l’aide de la capture de mouvements. Fan absolu de la saga, Gareth Edwards se montre confiant. «Je connais cet univers», déclare-t-il. «J’ai l’impression de rentrer à la maison». Un film de guerre aux scènes d’action brutes et viscérales ; des personnages nuancés, aux motivations complexes ; le probable retour de protagonistes légendaires, dont Dark Vador et le Grand Moff Takin. Parions que Gareth Edwards nous offrira la plus spectaculaire des guerres des étoiles…

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