MICKEY 17 : Entretien avec Robert Pattinson
Article Cinéma du Lundi 14 Avril 2025

Dans cette aventure de SF à l’humour vraiment très noir, Robert Pattinson(THE BATMAN, TENET), incarne Mickey Barnes, un garcon crédule et malchanceux qui doit quitter la terre de toute urgence. Il signe donc le premier contrat venu pour obtenir une place à bord d’un astronef rempli de colons, en partance vers une lointaine planète. Mais sans le savoir, Mickey a accepté de devenir un « travailleur remplaçable », un métier pour le moins ingrat, puisqu’il consiste à mener des missions si dangereuses qu’elles vont le tuer, pendant que les données recueillies seront analysées par les savants de l’équipage. Mais comme le corps de Mickey a été enregistré en 3D jusqu’au niveau moléculaire, et sa conscience et sa mémoire préservées dans un bloc informatique, on peut le ressusciter grâce à une imprimante organique. Le Mickey qui sort de la machine n’est pas un clone, mais une copie absolument parfaite du Mickey original, qui se réveille avec tous ses souvenirs, y compris ceux de sa dernière mort. Le pauvre cobaye supporte le calvaire de ces morts douloureuses en sachant qu’il sera ressuscité, et aussi parce que les résultats de ses missions aideront les colons à survivre, une fois arrivés à destination. Si on l’appelle Mickey 17 c’est parce qu’il a déjà mené à bien 17 missions mortelles...pour gagner sa vie !..

Entretien avec Robert Pattinson (Mickey Barnes)

Comment s’est passée votre rencontre avec Bong Joon-ho ?


À mes yeux, il y a, à l’heure actuelle, très peu de cinéastes de l’envergure de Bong, qui ont son aura. Il évolue dans un monde à part. Je l’admire depuis toujours. Ce projet est arrivé par hasard. On m’a juste dit qu’il préparait un film, je l’ai rencontré et je l’ai trouvé merveilleux. Ensuite, j’ai reçu le scénario et c’est l’un des projets les plus délirants que j’aie jamais lu. J’ai trouvé que c’était un scénario risqué, mais dans un sens très positif, et c’était formidable de s’engager dans une aventure aux côtés de quelqu’un dont on sent qu’il vous soutient. Je me suis embarqué là-dedans sans savoir à quoi m’attendre. C’est drôle parce qu’il est impossible de cerner la personnalité de Bong à partir de sa filmographie. C’est un type adorable, très drôle, très intéressant, qui a tendance à s’auto-dénigrer. Pas franchement ce à quoi je m’attendais. Mais il a un charisme incroyable. On ne s’en rend pas vraiment compte au départ. Mais ce charisme se propage à toute l’équipe de tournage et c’est très, très impressionnant.

De quoi parle MICKEY 17 ?

Il y a plusieurs éléments narratifs. Je m’en suis aperçu dès ma première lecture. Il y a, par exemple, des éléments de très grande envergure. Mais il y a aussi un humour très particulier. Dans un premier temps, on se demande comment ces éléments peuvent s’associer. À certains égards, le film fait presque l’effet d’un défi. (rires) Je n’avais jamais lu un scénario pareil et je ne pense pas que je relirai un projet semblable à l’avenir. Et c’était incroyable de savoir qu’un cinéaste de son envergure allait s’atteler à ce projet qui, d’une certaine manière, évoque une farce de SF. En réalité, je ne sais pas du tout comment parler du film, y compris le début : « Il s’agit d’un chef pâtissier dans un monde futuriste. Il tient un magasin de macarons. Il emprunte de l’argent auprès d’usuriers, en prenant un très gros risque, puis il s’embarque à bord d’une mission spatiale où on le duplique encore et encore. » (rires) On peut devenir fou rien qu’en cherchant à raconter l’histoire ! Au départ, je trouvais que c’était risqué, mais dès que je me suis lancé, j’ai changé d’avis. Bong sait très précisément ce qu’il veut filmer et il est si sûr de lui qu’on adopte son rythme très rapidement.

Comment décririez-vous le personnage de Mickey Barnes ?

Mickey est un personnage étonnamment complexe. Au départ, il nous fait penser à une sorte d’abruti, mais ce n’est pas le cas. Il est animé de désirs bien précis. Il est assez innocent et naïf à bien des égards. Il a beaucoup souffert dans son enfance et il doit surmonter d’importants traumatismes, mais quand il l’exprime, les autres trouvent cela ridicule. Pas lui. C’est spontanément drôle à mes yeux et totalement baroque. Il est orphelin et c’est son meilleur ami, rencontré à l’orphelinat quand il était gamin, qui le protège. Mickey n’a fait que le suivre toute sa vie et manque vraiment de confiance en lui. Le film raconte comment il arrive à devenir autonome. On peut dire que c’est la métaphore, poussée à l’extrême, de celui qui assume de se voir tel qu’il est ! (rires).

Mickey meurt à plusieurs reprises, puisque c’est son job...

C’était assez drôle dans le scénario, mais en voyant ces scènes à l’image, c’était horrible. (rires) On avait le sentiment de tourner ces séquences pour rire, mais quand on voit le résultat à l’écran, c’est très différent. Bong sait parfaitement trouver la bonne tonalité, en créant un climat anxiogène qui s’installe peu à peu sans qu’on s’y attende. La trajectoire de Mickey est terrible. Et sa vie est épouvantable. (rires) Mais je crois qu’on a besoin de le voir traverser ces circonstances extrêmes – et de le voir maltraité – pour mettre en valeur les aspects héroïques de son personnage. C’est très intéressant d’avoir un héros qui est parfaitement incapable de se considérer comme un héros. Il est dans l’autodénigrement permanent. Il en est arrivé à un point où ce trait de caractère est une vraie faille – il ne se rend même pas compte qu’il subit une torture – car, en réalité, il aspire à être accepté par le groupe et à donner un sens à sa vie. Je crois que le spectateur s’en rendra compte au cours du film.

Qui sont Mickey 17 et Mickey 18 ?

On dirait presque que Mickey 17 n’a pas conscience d’être en vie. Il a accepté la situation. Un peu comme s’il ne se rendait pas compte de ce qu’il a avant de l’avoir perdu. Et puis, Mickey 18 débarque – et lui, il a vraiment envie de profiter de la vie et il ne supporte pas la manière dont Mickey 17 se dévalorise. Du coup, celui-ci n’a d’autre choix que de prendre conscience de sa valeur car il risque d’être détruit par Mickey 18, même s’il a déjà été tué à de très nombreuses reprises. C’est difficile à expliquer car c’est un phénomène étrange. À mon avis, il s’agit de deux facettes de sa personnalité : la première cherche à progresser et à aller de l’avant, tandis que la seconde subit les événements sans se battre – et la première est écœurée par la seconde ! Mais on ne se rend pas compte qu’il s’agit de la même personne. Et on ne peut quand même pas décider de torturer et d’assassiner cette autre facette de sa personnalité ! (rires)

Comment avez-vous pu incarner de manière aussi distincte Mickey 17 et Mickey 18 ?

Je suis arrivé à Londres quelques mois avant le début du tournage, et j’ai testé de très nombreuses voix différentes pour les deux Mickey. C’est étrange parce qu’il s’agissait de jouer deux personnages qui devaient être caractérisés avec précision, mais dans le même temps, personne n’est capable de voir que ce sont deux êtres distincts. C’est très délicat. Au début, il fallait que je me demande qui était Mickey Barnes. J’ai appris que c’était un chef pâtissier, spécialiste de macarons, et j’ai dû prendre cela en compte. Et tout une myriade d’autres détails. C’était extraordinairement complexe. Mais j’ai commencé par jouer le personnage dans un tout autre registre. Ensuite, quand on a fait une lecture, Bong est venu me voir et m’a dit « Ne prends pas cette voix. » (rires) Je l’ai immédiatement écouté. Puis, les maquilleurs ont exacerbé le côté rebondi de mes joues parce que Bong, au départ, voulait que 18 soit un peu joufflu. On a donc testé plusieurs prothèses de joues – un dispositif auquel je n’aurais jamais pensé moi-même ! Au final, le personnage a juste une dent de travers. C’est un tout petit détail, mais qui me déformait légèrement le visage. Et je me suis dit que c’était suffisant. Ce n’est presque rien. On ne s’en rend quasiment pas compte. Mais du coup, mon élocution et ma démarche étaient un peu différentes. Cette petite dent de travers a même eu une incidence sur ma posture, sur mon attitude. On a donc exploré de très nombreuses pistes et, au bout du compte, il m’a suffi d’une petite dent de travers pour faire émerger une autre personnalité.

Pouvez-vous nous parler de la méthode de travail de Bong Joon-ho, pendant le tournage ?

Bong m’a prévenu que c’était très déstabilisant pour les acteurs quand un réalisateur comme lui ne cherche pas à se « couvrir », contrairement à tous les films que j’avais tournés jusque-là. C’est une méthode de travail très particulière qui s’applique dès le premier jour de tournage. On tournait un échange entre deux acteurs, puis on passait au suivant. Il faut rapidement prendre la cadence. C’est très efficace pour savoir comment moduler son énergie en fonction de la scène. En plus, Bong monte pendant le tournage et il avait envie de me montrer comment il fonctionnait. On peut vraiment voir ce qu’on a tourné et si cela correspond bien à l’atmosphère de la scène. C’est un incroyable travail d’équipe et on sent qu’on y est totalement associé.

Comment pourriez-vous définir le cinéma de Bong Joon-ho ?

J’en perçois l’humour sans hésitation. Je trouve que c’est un cinéaste extrêmement drôle. Quant à ses thèmes, il parle de la brutalité avec laquelle les êtres humains traitent leurs semblables. C’est étrange parce que ce n’est pas très drôle comme thématique. Je pense à MEMORIES OF MURDER par exemple. Ce qui me plaît le plus, en dehors des thèmes et du reste, c’est sa direction d’acteur. Il cerne si bien la dualité de ses personnages qu’on finit par s’attacher à des gens alors qu’instinctivement on sent bien qu’on ferait mieux de ne pas s’y attacher ! On perçoit un personnage comme quelqu’un de bien, puis un événement déstabilisant se produit qui remet en cause notre perception. Je crois que c’est un thème à part entière dans son œuvre : les apparences sont trompeuses.

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